Mardi c’est le début du Festival de Cannes et il nous apparaît important de revenir dessus. Pourquoi cet événement est-il à ce point déprécié du grand public, qu’en est il vraiment ?
En effet, le Festival de Cannes souffre d’une image négative. Pour une très large partie du public, il s’agirait d’une de ces manifestations paroxystiques de l’entre soi bourgeois, de la vulgarité et du luxe. Et à cette critique, il est vrai que nous n’avons pas grand chose à opposer. Nous non plus on n’est pas fan du côté tapis rouge, strass et paillettes. Cependant, on ne peut pas en toute bonne foi résumer le Festival de Cannes à une simple auto célébration de l’aristocratie culturelle hexagonale.
Le Festival de Cannes, c’est un lieu où l’on découvre des films, toutes sortes de films. Il y a comme chaque année des auteurs attendus, des habitués mais aussi une quantité très importante de films inattendus dont on ne sait rien et qui se révèlent parfois être des grandes œuvres. Pour le coup autant revenir dessus c’est l’un des autres griefs qu’on entend souvent à propos du Festival de Cannes et qui voudrait qu’on y voit que des films serbes en noir et blanc très ennuyants pour des intellos snobs. Non seulement c’est totalement faux mais en plus c’est nier qu’un film serbe en noir et blanc, ça peut être passionnant. On retrouve au Festival de Cannes une diversité de films, il y en a pour tous les goûts ; du cinéma d’auteur, du cinéma de genre, du cinéma d’horreur, de la comédie et même du gros blockbuster bien bourrin (l’année dernière Fast and Furious 9, cette année Top Gun : Maverick). Et ça c’est parce que le Festival de Cannes est un évènement énorme qui ne se limite pas seulement à la compétition officielle qui est principalement relayée par les médias généralistes.
Il y a d’autres sections comme “La Semaine de la Critique” dans laquelle on ne retrouve que des premiers et deuxièmes films, donc de la nouveauté.
C’est le cas aussi de “La Quinzaine des Réalisateurs” qui a pour règle de ne jamais sélectionner plus de deux fois un même réalisateur, donc ici aussi, les œuvres sélectionnées sont chaque année différentes et très variées.
Enfin il y a “Un Certain Regard” qui est une sélection où l’on retrouve des œuvres singulières, osées, expérimentales, bref des films que vous n’avez pas l’habitude de voir.
C’est également le cas de “l’ACID” (NDLR : Association du Cinéma Indépendant pour sa Diffusion) qui se déroule aussi à Cannes pendant le Festival qui est une sélection de films indépendants, souvent des œuvres fragiles, inattendues et originales.
Bref, si vous êtes cinéphile ou cinéphage, le Festival de Cannes devrait vous intéresser et mérite que vous y jetiez un coup d’oeil, d’autant plus que cette année, le diffuseur du Festival de Cannes n’est plus Canal+ mais France Télévisions, l’évènement va donc être visible par un nombre de personnes bien plus large.
Enfin, le Festival de Cannes est un événement qui participe au rayonnement de la France (et donc plus largement de la francophonie). C’est avec Venise et Berlin l’un des trois plus prestigieux festivals de cinéma au monde et probablement le plus prestigieux. Comme il s’y tient le “Marché du film” (NDLR : là où des milliers de films se vendent, trouvent un distributeur etc), c’est un avantage important pour le cinéma français/franco-belge. La rédaction d’Univers étant composée de plusieurs Français•es, c’est quelque chose dont nous sommes fier•es, comme nous sommes fier•es de notre cinéma belge ! Le cinéma français est une industrie puissante qui produit chaque année parmi les meilleurs œuvres du monde et c’est quand même plus classe d’exceller dans la production de films que dans la vente d’armes.
De plus, à l’heure où les plateformes de SVOD comme Netflix ou Disney+ dominent le marché, c’est bel et bien au Festival de Cannes qu’il faut chercher de la nouveauté. Ces plateformes, grâce à leur puissance économique colossale, n’ont aucune difficulté à communiquer et à toucher le public, c’est donc vers les festivals qu’il faut se tourner pour voir : de nouveaux auteurs, des prises de risques, un renouvellement du septième art. Amazon, Apple, Netflix et consort ne prennent pas de risques économiques, elles ne misent jamais sur la nouveauté ou la singularité (d’ailleurs le plus souvent elles ne misent pas non plus sur la qualité), elles génèrent du contenu, des produits d’appel, des produits marketing : elles sont au cinéma ce que le bruit est à la musique. Cannes c’est un endroit où les nouveaux talents peuvent éclore, où un film fauché fait par des inconnus peut être porté aux nues et révélé au grand public.
Pour conclure, on conçoit tout à fait que vous n’en ayez rien à faire du Festival de Cannes mais si vous vous intéressez au cinéma, que vous voulez être surpris•es, émerveillé•es, ému•es, vous devriez vous pencher sur cet évènement. Nous devrions nous, collectivement, nous en emparer pour l’améliorer, le changer, mais en aucun cas le bouder.
✍️ : Barnabé Batisse
🖌 : Siilen Dig
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